Un matin où nos centaines de millions de semblables qui, hier soir encore, souffraient de la faim, seraient enfin entendu.es, un plan d’urgence, réfléchi et durable, ayant été concrètement mis en place.
Un matin où les appels répétés à une responsabilité planétaire prenant en compte nos devoirs en matière d’engagement environnemental, feraient sens commun, taisant l’indifférence, le scepticisme voire l’hostilité qu’ils avaient pu jusqu’ici susciter.
Avec eux, un nouveau rapport à l’eau, à la forêt, aux déchets, à l’énergie, à l’océan, à l’alimentation, à l’habitat, au transport... s’instituerait naturellement, source des décisions les plus conséquentes, individuelles et collectives.
Un matin où les explosions de haine et de vengeance qui ont de tous âges alimenté l’agonie du monde et de ses enfants, s’envoleraient, comme si leur déraison morbide s’était dissipée avec les premiers rayons du soleil.
Un matin où l’idée du progrès technique serait profondément revisitée par une pensée éthique et prospective, modifiant notre vision des bouleversements présents et à venir et leur gadgétisation à outrance.
Un matin où le choix d’un enrichissement aveugle, le choix d’une accumulation craintive, paraîtrait soudain si obsolète, si archaïque, tandis que des courants, des torrents d’actions associatives et caritatives seraient encouragés de toutes parts.
Un matin où la diversité culturelle, philosophique, spirituelle, artistique, faisant hier encore face à tant d’incompréhensions et de rejets réciproques, se fondrait dans un environnement pacifié, mutuellement enrichissant.
En ce même matin au coin de la rue, nous verrions une jeune personne donner le bras à une aînée hésitant à traverser.
Et tout au long du chemin, nous observerions des visages souriants ayant regagné confiance dans une souveraine et simple solidarité de l’instant présent comme si toutes les incivilités, toutes les nuisances faussement banales, avaient perdu leur attache.
Puis pour la première fois de l’année, nous parcourrions le fil d’actualités et à la litanie des catastrophes, des promesses de conflits et des cohortes de désinformation, au flot des contentieux, des affrontements stériles et des dénigrements de toutes sortes, se substituerait une construction commune, faite de pensées positives, d’entreprises innovantes, de volontés de conciliation...
Parallèlement à tout cela, une nouvelle cartographie des métiers, du rapport à nos activités et à la justice sociale qui devrait en émaner, une vision intergénérationnelle riche d’un partage sans précédent, se déploierait, ajustant nos systèmes éducatifs, consolidant leur aptitude à répondre à l’un de nos plus grands défis, celui de la dignité humaine pour tous et toutes.
Oui, ce matin du 1er janvier 2020, faisant écho à toute l’espérance du monde et aux voix de justice et de paix, un projet humaniste s’installerait naturellement, comme si la générosité nourrie de longue date par une succession ininterrompue d’êtres souvent anonymes, avait décidé de converger sans détour.
Un projet dans lequel, loin des affrontements d’égo et des rivalités stériles, nulle figure emblématique ne se mettrait en avant, confiant à chaque personne le soin de le porter, l’animer, l’incarner, le prolonger, le faire évoluer...
Et avec ce projet, une redistribution des priorités et des rapports humains, une réflexion équitable sur le partage des biens communs, matériels et immatériels, un sens de l’écoute et du dialogue, gagneraient des myriades d’esprits...
Oui, ce serait un matin à l’aube d’une année appelée à lui donner le visage d’innombrables réalités...
Mais, bien entendu tandis que nous l’évoquons, certains nous diront qu’un tel matin ne peut être, que son rêve semble bien trop utopique pour se réaliser... Et comment ne pas reconnaître pareille lucidité ?
En sommes-nous cependant si sûr.es, car en ce 1er janvier 2020 songeons qu’un tel matin, aussi idéaliste puisse-t-il paraître, ne dépend finalement pas de grand-chose, puisqu’il n’attend que nous pour s’accomplir.
Une seule question demeure : attendra-t-il longtemps encore ?
Alors, du fond du cœur, du fond de l’âme, puissions-nous saisir cette année 2020 dont le miroir, unique en ce siècle, comporte l’idée de dépasser toutes les formes d’évitement et de report.
Que l’année soit donc propice à promouvoir les innombrables voies du réenchantement, et à faire en sorte que chacun.e puisse y trouver sa place aussi modeste soit-elle, ou plutôt tout particulièrement si elle nous paraît modeste.
Que mille vœux de bonheur, de bien-être partagé et d’épanouissement vous accompagnent ainsi que les vôtres sur les chemins de renouveau,
Au plaisir de nous y retrouver,
En ce matin du 1er janvier 2020,
Quelque part sur la carte des infinis possibles,
Eric